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  • Photo du rédacteurReporters Audacieux 18-19

Naître à deux et mourir seule

Par Élizabeth Mageren. Reporter Audacieux 2018-19, le 22 octobre 2018

L'ENTITÉ DU DOUBLE © David Wong

À quoi ça sert de naître à deux, si on doit mourir tout seul?

Un texte récité en presse, sans pause, bondissant d’une sœur à l’autre. Les jumelles couchées sur le dos, côte à côte, le micro porté à la bouche. Puis, un silence. C’est à ce moment que Séverine prononce ces mots, comme s’ils lui brûlaient le ventre.

« À quoi ça sert de naître à deux, si on doit mourir tout seul? »

À cet instant, assise sur mon siège, je cesse de respirer. Comme si, depuis quelques minutes, mon existence reposait sur le rythme de leurs paroles. Comme si les femmes qui se tenaient devant moi me définissaient entièrement. Comme si, moi, fille unique et encore moins jumelle, je comprenais exactement ce qu’elles vivaient toutes les deux.

L’entité du double, c’est une quête identitaire. C’est une œuvre qui porte sur les doutes et les questionnements de jumelles oui, mais surtout, qui soulève ceux de tous les êtres humains. C’est pour cette raison, je crois, que cette pièce est en mesure de toucher chacun et chacune d’entre nous. Puisque, jumeau ou pas, tout le monde se questionne. Tout le monde s’interroge sur sa place, ses désirs ou ses ambitions. Le fait d’être jumelle ne fait qu’ajouter un facteur à l’équation. Du moins, c’est ce que j’ai perçu à travers le travail de Séverine et Élodie Lombardo-Schmutt.


Divisée en plusieurs petits chapitres, la pièce présente habilement la dynamique entre les jumelles. Vers la fin, un passage qui en est un parfait exemple : alors que l’une raconte une anecdote sur le Noël de leurs 5 ans, l’autre explique en détails ce qui se déroulait dans le ventre de leur mère lorsqu’elle était enceinte. Deux histoires complètement différentes dans lesquelles on peut tout de même déceler beaucoup de similitudes. Dans les deux cas, on saisit immédiatement la relation entre les deux sœurs.


Puis, pour un spectacle abordant un sujet qui se vit habituellement seul, il pousse énormément le public à entrer en relation avec l’autre. Dès le début, le spectateur est plongé dans l’univers des jumelles et elles sont sans pitié. Elles interagissent avec leur public, lui parle dans les yeux, l’invite à participer à leurs réflexions… On sent en elles un grand amour pour leur art ainsi que pour les gens qui s’y intéresse.


Dans L’Entité du double, Les sœurs Schmutt n’ont pas hésité à briser les conventions de la danse et à aller creuser là où elles n’avaient jamais été. Habitées d’un grand désir de partager, elles nous livrent une performance authentique et vraie qui semble très près d’elles.



 

À propos de l'auteur : Élizabeth Mageren

Elizabeth Mageren baigne dans la danse et le théâtre depuis l’enfance. Elle termine son secondaire en art dramatique à Robert-Gravel en 2017, puis entame son DEC en cinéma au Cégep de Saint-Laurent. À l’adolescence, elle est membre d’une troupe de danse contemporaine et, en mars 2018, elle fait partie de la distribution de La déesse des mouches à feu au Théâtre de Quat’sous, ce qui confirme son amour des arts vivants et la pousse à vouloir aller plus loin dans sa démarche artistique. Au sein de Reporters Audacieux, Elizabeth souhaite apporter un nouveau regard à la danse contemporaine et peut-être faire naître un intérêt pour l’art local chez les jeunes adultes de son âge.

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