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El silencio de las cosas presentes - Entrevue avec Nathan Giroux : Instant de pause

Dernière mise à jour : 22 janv. 2019

Par Léa Villalba, Reporter Audacieux 2018-19, le 18 janvier 2019


Gabriel Vignola & Nathan Giroux (en studio de création) © David Wong_Danse-Cité

Dans l’intime Théâtre La Chapelle, j’ai rendez-vous avec Nathan Giroux, compositeur-musicien de la pièce El silencio de las cosas presentes d’Eduardo Ruiz Vergara qui débutera dès mercredi prochain. J’arrive 5 minutes d’avance et j’ai la chance de surprendre l’artiste, seul, hors du temps, qui pianote dans cette salle vide. En toute humilité, il nous parle de sa façon de voir cette création.


C’est durant sa formation au bac en musique que Nathan entend parler du projet d’Eduardo, qu’il appelle amicalement Edu. C’est une amie qui étudiait alors au bac en danse, l’interprète Sophie Levasseur, qui lui tend la main.


« C’était plus un projet pour le fun. Je pense qu’on a intégré le projet à la base surtout pour parler avec Edu, interagir avec lui, apprendre de lui parce qu’il a vraiment une personnalité intéressante. Je pense que c’est la raison pour laquelle il a réussi à ramasser 14 personnes non payées pendant deux ans pour travailler sur le projet! (rires) »


Formé en tant que pianiste classique et habitué à créer pour des courts-métrages et des documentaires, le musicien nous explique que ce projet l’a véritablement sorti de sa zone de confort.


« Moi, je suis habitué à travailler avec des choses écrites. J’ai une trame claire et linéaire à suivre. Là, avec Edu, il a fallu davantage improviser. Il m’a dit « meubles 40 minutes de temps, live !», c’était difficile au début ! (rires) Avec ce projet, on veut être dans le partage d’énergies. Les musiciens interagissent avec les danseurs donc ça ne pouvait pas être préenregistré. »


Il a alors fallu que l’artiste s’habitue à jouer avec la danse et qu’il se fasse une place, tout aussi importante que celle des autres artistes.


« Au début, je me disais « il faut que je sois plus background, ce n’est pas moi le centre, je ne suis pas le pianiste classique habituel. Je suis plus comme le décor et je leur laisse la place ». Mais il y a d’autres moments où j’ai réalisé que les interprètes veulent être dirigés par la musique. Ils veulent avoir quelque chose de plus intense qui va prendre des initiatives qui n’ont pas forcement de rapport avec la danse, mais qui va les lancer sur autre chose! Finalement, c’est un véritable dialogue. Le jeu de pouvoir doit alterner pour que ce soit intéressant ».

Nathan Giroux au piano (en répétition) © Léa Villalba

Et pendant le spectacle, les deux compositeurs/musiciens jouent avec leurs différents instruments pour construire du sens et s’allier avec les interprètes sur scène pour créer toutes sortes de sensations chez le spectateur.


« Il y a des bouts écrits mais aussi, de l’autre côté du spectre, il y a des moments totalement improvisés au pad. Puis entre les deux, il y a des moments semi-écrits où j’ai une trame en background et je fais des arrangements par-dessus. Parfois, c’est plus méditatif avec un pad d’orgue qui va rester là. Mais à l’inverse, pendant le solo par exemple, il y a comme une schizophrénie, une folie urbaine avec des sons intenses. On essaie de couvrir un grand « range » d’émotions ».


Et dans cette pièce, ce sont les émotions qui comptent, les sens de chacun. Pour le musicien, cette pièce sert de « pause », d’espace « méditatif » et veut surtout s’éloigner des codes traditionnels du spectacle.


« Je pense qu’il y a un désir de prendre son temps. On veut se rapprocher le plus possible d’un vrai moment humain. Essayer de ne pas être dans la représentation, mais être dans l’être, être vraiment juste présent. Les gens sont habitués à ce que ça roule, à ce que ça n’arrête jamais, à être diverti par la « machine-spectacle ». Là, c’est plus ouvert, on laisse les gens vivre leur propre expérience. Il y a des longs moments où, selon les critères d’un show « normal », il ne se passe rien. Il y a un minimalisme dans cette création afin de susciter chez les gens de nouvelles réactions ».


Pour couvrir toutes sortes de sensations et d’émotions, le chorégraphe s’est donné trois heures pour cette pièce. Et c’est tout un défi à relever comme nous explique le musicien.


« En trois heures, plein de problèmes techniques peuvent survenir donc c’est le stress ! (rires) Puis pendant trois heures, il faut toujours se remettre dedans. Tu perds ta concentration, ton focus. Si je suis présent avec eux dans l’espace et que je suis dans la pleine conscience, ça va être bon. Mais si je ne suis pas vraiment là, vu que c’est une question d’interaction, la qualité descend. Il faut constamment se remettre dedans ».


Et pour en savoir un peu plus, j’ai demandé des détails concernant la musique, histoire d’essayer de me visualiser un peu la pièce. Comment faire pour intégrer la musique dans une pièce sensorielle qui évoque le toucher ? À quoi va ressembler la musique ?

« Ça passe beaucoup par la basse. Ce sont ces fréquences qui ont le pouvoir de bouger les objets, de faire sentir quelque chose de puissant. Toute la première demi-heure, c’est un gros crescendo de basses. Pendant ce temps-là, Edu « shake ». Après ça, c’est l’inverse, ça devient super doux. Ça devient comme des textures de copeaux de bois, des sons super délicats et les filles sont en train d’explorer leur corps et de suivre les plis de leur peau.


Il y a des moments de contraste aussi. Le solo de piano est super actif par exemple alors que les deux interprètes sont fixes. Des fois il y a un jeu de contraste des fois on se suit ».

Il nous en livre ici, quelques extraits …




 

À propos de l'auteur : Léa Villalba


De sang espagnol et originaire du sud des Landes, c’est à l’été 2015 que Léa arrive à Montréal, ville captivante par son dynamisme et sa richesse culturelle. Diplômée en France dans plusieurs domaines dont la Science Politique, la Sociologie et les Arts du spectacle et danseuse depuis la plus tendre enfance, c’est à l’automne 2016 qu’elle intègre la Maitrise en Danse à l’UQAM au sein de laquelle elle entame une recherche sur la danse hip-hop à Montréal. Passionnée d’écriture depuis toujours, elle collabore depuis l'hiver 2017 à divers magazines web (Artichaut, l'Outarde Libérée, La Bible Urbaine, Sors-tu.ca, Les Méconnus) afin d’apporter davantage de visibilité à la danse et d’aiguiser son œil critique.

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